DU SANG SUR SES LÈVRES

14 mars 2021

Roman de

Isabelle GAGNON

Édité chez

Le mot et le reste

Date de sortie
18 février 2021
Genre
Roman noir
Pays de l'auteur
Canada
Avis

J'ai toujours été attirée par le vide. Quand nous marchions le long des sentiers, tu tirais la manche de mon manteau pour m'éloigner du bord des falaises.Tu craignais que les fortes bourrasques me fassent perdre l'équilibre.Tu prenais ton rôle de frère au sérieux. Je te laisser jouer au plus fort même si au fond je savais que tu étais le plus fragile de nous deux.Pendant que tu t'évertuais à veiller sur mon corps, moi je tentais de te sauver

Il n’y a pas à dire, j’aime les romans courts. Non pas par fainéantise, mais parce que lorsqu’il est bien écrit et bien construit, le plaisir ne se fait pas attendre. Il est là, dès la première page, dès les premiers mots.

A une époque où la tendance va aux pavés de 600 pages et plus, où le superficiel rivalise avec l’insipide, il est bon de découvrir ces novellas et petits romans qui démontrent qu’il n’est pas besoin de sombrer dans une surenchère de pagination pour offrir à son lecteur un texte passionnant à lire.

Le bouquin d’Isabelle Gagnon fait lui à peine plus d’une centaine de pages et rend hommage à ces publications de qualité.

L’enfance, c’est là que s’ancre la nostalgie d’une vie, ce sentiment d’un paradis à jamais perdu où l’on aime à se réconforter en pensant à lui.

Mais c’est aussi parfois un abîme ténébreux et périlleux pour l’adulte, un puits au fond duquel finit de se putréfier l’innocence et la confiance au monde.

Ils sont frère et sœur. Ils sont unis par le sang.

 Pas seulement par celui qui coule dans leurs veines, aussi par celui versé.

Alix a mis du temps à le localiser. A dû faire appel à un détective pour retrouver sa trace. Là-bas, au Québec, installé dans une cabane dans les bois. Tapis comme un félin attendant son heure.

Et c’est bien ce qu’il fait.

Elle saute dans un avion, loue une voiture et se procure un flingue, et va le rejoindre avant qu’il ne soit trop tard. Car elle sait sans l’ombre d’un doute ce que Paul a décidé d’entreprendre.

Ils ont dû vivre avec les démons de leur enfance, sans jamais réussir à les dompter. Monster a explosé leur vie, les a éloigné tout en les soudant dans cette même souffrance partagée.

Deux êtres écorchés, aux nuits peuplées de cauchemars. Des survivants qui ont cherché à tenir en équilibre sur le fil de l’existence.

Mais cette fois-ci Paul est bien décidé à affronter ce mal et à aller jusqu’au bout.

Des retrouvailles des deux jumeaux, qui de la raison ou de la soif de vengeance triomphera ?

« Du sang sur ses lèvres » c’est d’abord cette incroyable montée en tension qui s’opère à mesure que l’on avance dans l’histoire, et qui vous fait tourner les pages toujours plus vite.

On devine que les choses finiront mal, mais on ne sait pas comment elles vont  réellement évoluer. Et c’est bien là tout le talent d’isabelle Gagnon que de diffuser cette atmosphère oppressante, et  qui offrira un final surprenant et parfaitement réussi à son lecteur, là où quelquefois un auteur se rate.

A cela s’ajoute cette relation particulière entre ces jumeaux marqués par cette même blessure qui reste béante. Mais s’ils sont unis dans cette souffrance, chacun la porte de manière très personnelle,car  celle-ci les a mis aussi à distance.

Une fracture qui a façonné leur être et dont elle les conduit à un destin que l’on devine très sombre.

L’urgence à retrouver son frère, tient autant à l’idée de l’empêcher absolument faire ce qu’il se prépare à exécuter, qu’à être lié à lui pour faire face ensemble à ce passé traumatisant dont la source est encore bien vivante.

Mais s’agira-t-il de s’en libérer ou de s’y perdre définitivement ?

« Du sang sur ses lèvres » et un petit bouquin qui n’a donc rien à envier aux romans de trois cents pages et plus, et qui est vraiment réussi.

Je ne connaissais pas Isabelle Gagnon. Après quelques recherches j’apprends qu’il s’agit d’une auteure d’origine canadienne, québécoise plus précisément, et qui outre-Atlantique, a déjà écrit plusieurs titres.

Gageons alors que les éditions « Le mot et le reste » qui font le pari de la publier en France nous offriront bientôt l’occasion de poursuivre la découverte de cette auteure talentueuse.

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