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Il y a quelques années, à l’occasion du festival Quais du Polar, j’avais eu la chance de passer une soirée au restaurant avec Sandrine Collette et quelques amis de l’époque. Une femme adorable, souriante et d’une grande humilité.
Depuis, chaque fois que je lis un de ses romans (je ne les ai pas tous lus), je suis toujours à me demander comment une femme aussi délicieuse et charmante peut écrire des textes parfois très sombres et durs comme Juste après la vague. En tout cas, c’est toujours avec un vrai plaisir que je me laisse embarquer par ses romans.
Avec « Juste après la vague », Sandrine Collette nous plonge d’emblée dans une situation de survie d’une intensité rare .

@eduardo-drapier
un volcan s’effondre, une vague monstrueuse engloutit tout sur son passage, ne laissant debout qu’une maison, perdue au sommet d’une colline. À l’intérieur vit une famille composée de Pata, Madie, et leurs neuf enfants.
Pendant quelques jours, ils scrutent l’horizon, espérant secours et délivrance. Mais l’eau continue de monter, les vivres s’amenuisent, et il devient clair qu’il faudra fuir.
Oui mais voilà, la famille n’a qu’une barque à sa disposition, trop petite pour emmener tout le monde. Les parents devront laisser trois enfants derrière eux.
Ce point de départ, déjà insoutenable, ne sert pourtant que de tremplin à Sandrine Collette pour explorer les tréfonds de l’âme humaine.
La première partie suit les trois laissés pour compte, livrés à eux-mêmes sur ce bout de terre qui disparaît peu à peu.
L’insouciance des premiers jours cède rapidement la place à la faim, à la peur, à l’attente interminable d’un retour qui tarde.
Les pages nous enferment avec eux, dans ce huis clos à ciel ouvert où l’espoir se réduit à quelques miettes de pain sec et à la promesse, presque fragile, des parents.

@nico-h
La deuxième partie, elle, nous embarque sur la mer avec le reste de la famille. La mère prostrée par la culpabilité, le père qui rame pour sauver ce qui peut encore l’être, les enfants silencieux qui ne comprennent pas tout mais savent que quelque chose s’est brisé.
La traversée est longue, épuisante, semée d’épreuves. Il ne s’agit plus seulement de survivre à la faim ou aux flots, mais de composer avec ce choix impardonnable qui colle à la peau comme une plaie béante.
Et puis il y a Madie, cette mère écartelée, rongée par ce qu’elle a dû faire, incapable de se résoudre à l’idée que ses enfants restés derrière puissent mourir seuls. Sa détermination, irrationnelle peut-être, guide la dernière partie du roman et donne au récit une force bouleversante.
D’une histoire de catastrophe, Sandrine Colette parvient à la transformer en une méditation sur l’amour, la perte et le courage.
Elle évite toute démesure, suggère plus qu’elle ne montre, préférant la retenue aux grands effets. Pas de descriptions interminables des ravages du raz-de-marée donc, ni d’effets grandiloquents .Ce sont les gestes hésitants, les mots tus, les pensées qui vacillent qui donnent toute sa force au drame.
La construction du récit, alternant les points de vue et les lieux, installe une tension qui ne faiblit jamais. On lit avec la gorge serrée, partagé entre la peur de tourner la page et l’impossibilité de refermer le livre avant la fin.
Juste après la vague n’est pas qu’un roman catastrophe, c’est aussi une fable cruelle qui interroge sur ce que nous serions prêts à faire pour sauver ceux que nous aimons. Et le lecteur ne pourra s’empêcher de se demander ce qu’il aurait fait , lui, dans cette même situation.
Sandrine Colette, signe un roman difficile , déchirant mais aussi plein d’humanité, où la douleur n’éteint jamais la lueur fragile de l’espérance.
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