VA MANGER TES MORTS

23 janvier 2022

Roman de

Pascal MARTIN

Édité chez

Jigal

Date de sortie
25 septembre 2021
Genre
Policier
Pays de l'auteur
France

Vous pouvez parfois mener une vie morne, tout en excellant dans une routine professionnelle sans relief qui suffit à remplir votre existence.

Prenez Rio Capo Ortega par exemple. Un type bien ce Rio. Le genre de mec qui ne s’énerve jamais des petites contrariétés du quotidien. Discipliné, besogneux, sachant se contenter des plaisirs simples de la vie.

Mais ne vous y trompez pas tout de même. Rio est un opiniâtre, un obstiné. Dans son boulot d’enquêteur pour les assurances il sait flairer le détail qui cloche et débusquer l’arnaque. C’est un des tous meilleurs de la boite qui l’emploie, et les résultats de ses investigations ne sont jamais contestés.

À côté de ça, c’est un homme aux goûts simples qui aime à manger dans les restaurants qu’il ne fréquente qu’une seule fois.

Jamais il n’aurait pensé que sa petite vie bien organisée puisse être brutalement bouleversée.

Mais parfois, un mot, un geste, un concours de circonstances font que tout bascule, que votre horizon sans nuage s’assombrit et vire à l’orage.

A la table du restaurant où il s’est installé, il assiste à une scène odieuse. Une jeune femme se fait violemment gifler par l’homme avec qui elle déjeune.

Choqué de ce qu’il voit, lui qui n’a pas l’habitude de se mêler des affaires des autres, il intervient pour que cesse cette brutalité. La réaction est immédiate, l’individu s’en prend à lui et l’envoie valdinguer au sol.

C’est à ce moment-là que la jeune fille sort une arme de son sac à main et abat à bout portant son agresseur.

À partir de cet instant, la vie de Rio ne sera plus la même. Embarqué bien malgré lui dans ce drame, le voici contraint de s’enfuir avec Romane, jeune gitane meurtrière.

C’est le début des ennuis et d’une cavalcade éperdue qui prendra vite l’apparence d’un road movie palpitant, où le danger omniprésent poussera nos deux fugitifs à serrer les coudes et à faire front commun.

À mesure qu’ils risquent leur peau, que la mort rôde près d’eux et que les situations périlleuses se succèdent, ils se découvrent pour finir par s’attacher l’un à l’autre.

Pour Rio, la jeunesse de Romane, sa fougue, sa légèreté, son indifférence au péril, sa capacité à vivre l’instant présent sans se soucier du lendemain , est un vent violent dans sa vie qui balaye la poussière d’une existence restée trop longtemps sans relief.

Cette cavale est pour lui une renaissance. Fuir à en perdre haleine, respirer à pleins poumons, aimer passionnément, avoir enfin le sentiment d’être vivant. Qu’importe où cela le mènera, qu’il soit recherché par la Police ou par les hommes de main de celui qui fut abattu dans le restaurant, ces quelques jours passés avec Romanes remplissent des années de vide.

« Va manger tes morts » est paru en même temps que «  Fucking Melody » de Noël Sisinni, là aussi aux éditions Jigal.

credit: Tarsiger

Deux histoires qui ont des similitudes, puisqu’au cœur de celles-ci on retrouve deux jeunes héroïnes en fuite avec un homme qui n’avait rien demandé et qui est embarqué dans une drôle d’aventure.

Mais autant j’ai pu détester le personnage de Fiorella dans « Fucking Melody » pour son égoïsme et son indifférence aux autres, autant j’ai adoré celui de Romane, jeune rebelle touchante bien décidée à dompter la vie, qui s’offre à corps perdu et dont le cœur brûle d’une humanité réconfortante.

C’est en effet un être haut en couleur que dessine Pascal Martin avec cette jeune gitane qui ne s’exprime que dans le dialecte manouche (un peu désarçonnant au début pour le lecteur, mais on finit par s’y faire) et qui apporte toute l’originalité et la fraîcheur du bouquin.

Ceci dit celui de Rio n’en est pas moins touchant par sa sensibilité. Un homme dont la flamme intérieure renait sous le souffle de cette jeunesse impétueuse qui l’emporte dans un maelström de liberté et d’insouciance.

« Va manger tes morts » est l’ultime roman signé de la plume de Pascal Martin, auteur qui nous a malheureusement quitté il y a peu.

Rythmé, ne manquant ni d’actions ni de péripéties, porté par des protagonistes attachants, il ravira les amateurs du genre.

J’ignore si Pascal Martin savait qu’il allait partir au moment où il couchait ses mots sur les pages blanches, toujours est-il que ce dernier roman est un hymne à la vie, à la nécessité impérieuse de la croquer à pleines dents, pour ne pas vieillir rongé par les regrets.

Quel plus beau message pour clore une carrière d’écrivain ?

2 Commentaires

  1. LIONEL

    Merci Bruno pour ce livre…….déconcertant (écriture à deux voix l’une Française, l’autre presque toute en Argot Gitan, Manouche….) , percutant (le début du récit), troublant (tant les deux «acteurs» étant diamétralement opposés «quoique»), attachant (Rio et Romane sont faits l’un pour l’autre sans le savoir), choquant (livre cru et brut de décoffrage) ……….
    Narration à 100 km/h, agréable fluide toujours dans l’action, court et c’est bien. Une bonne histoire, captivante. La fin, attention (spoiler) happy end, comme nous (lecteur) le souhaitons tous, vraiment une belle découverte de cet écrivain disparu trop tôt.

    Lisez cet ouvrage, vous ne serez pas déçu, c’est entraînant agréable suspendu dans l’espace sans ce malaise sociétal actuel, une très riche découverte du moins pour moi, j’ai passé un merveilleux moment (court le livre fait un peu plus de 150 pages) mais franchement foncez et LISEZ dépaysement total garanti

    Amicalement ……..à Bruno et à tous

    Merci Petite Souris pour tout ton travail………….

    Réponse
    • La petite souris

      Bonjour Lionel ! je crois que tu as tout dit !! heureux de voir que ce roman t’a énormément plu à toi aussi ! 🙂

      Réponse

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