LOUPO

15 janvier 2014

Roman de

Jacques-Olivier Bosco

Édité chez

Jigal

Date de sortie
12 septembre 2013
Genre
Policier
Pays de l'auteur
France

C’est une course folle, effrénée, éreintante. C’est une balle qui fuse et traverse l’existence en fracassant tout sur son passage, et qui file se loger dans un destin que l’on devine déjà funeste. Une vie façon Doum-Doum , perforante, destructrice, dévastée et dévastatrice.

 Cette vie, c’est celle de Loupo. Un gars des banlieues, à qui très tôt , enfermé dans le placard familiale on a arraché les ailes de son avenir. Détours par la case DASS, le temps de comprendre que la société ne veut pas de vous, le temps d’apprendre à la détester. Le temps aussi de se choisir une famille. Ce sera Kangou et le Chat.

20 ans maintenant qu’ ensemble ils mènent leurs petites affaires. Le Chat trouve des casses, Loupo et Kangou braquent ; des banques, des bureaux de postes, des cinémas, en attendant le gros coup promis par leur ami.  Ce n’est pas tant l’appât du gain qui attire Loupo que cette montée d’adrénaline dont il fait une addiction et qui représente le seul piment de sa vie. Ce sont aussi ces instants partagés avec Kangou, son double, son ombre, une complicité fusionnelle où les mots sont superflus.braquage

C’est au cours d’un de ces braquages que le drame survient. Loupo a la manie de toujours faire usage de son arme , de tirer un coup en l’air ou dans un mur, histoire d’annoncer la couleur, de calmer les ardeurs héroïques des inconscients présents sur place. C’est ma méthode pour qu’il n’y ait pas de malentendu, qu’on est pas là pour rigoler, ça fait bouger les biftons plus vite, et les esprits aussi . »

Ce jour là, dans cette succursale, c’est sur un panneau publicitaire ventant les mérites d’un crédit à la consommation trônant au milieu de la pièce qu’il tire. Et c’est en plein dans le mille de la vie d’un gosse caché derrière celui-ci qu’il fait mouche. Une victime inutile.Et des caisses vides. Car la banque était prévenue du braquage. Le coup foireux dans toute sa splendeur. A défaut de ressortir de la banque avec le fric, c’est la rage dans la tête d’avoir été balancé et le poids énorme des remords qui s’affaisse déjà sur eux qu’ils s’enfuient à moto, sans même savoir si le môme est vraiment mort. Pour la première fois ils ont merdé, et de manière magistrale.

vitessePour Loupo tout bascule. Le venin de la culpabilité se répand et ne tarde pas à faire son œuvre. Il ronge, il dévore, il détruit et met à genou les caractères les plus forts. Loupo envisage, « je pourrai me tirer une balle dans le cigare , me faire la loi, mais pas la justice. La justice c’est la mère du petit qui tord les draps du côté de Trousseau ou Saint Antoine. C’est à elle que je la dois ». Alors il décide qu’il se rendra, qu’il prendra vingt ans et qu’il assumera. Mais il ne se laisse aucune échappatoire . « Après (…) je sais déjà ce que je ferai, ce sera ma liberté et mon cadeau à ces pauvres parents. Quand je sortirai j’irai le chercher, le tabouret, et aussi la corde de chanvre, et je mettrai un point final à leur malheur ».aqw

Mais avant Loupo doit s’occuper de son pote Kangou. Le mettre au jus de ses décisions , à l’abri aussi, ainsi que sa femme qui attend un gosse. Les faire partir loin afin qu’ils s’inventent une autre vie, car il sait que sans lui il ne tiendra pas longtemps dans ce milieu. Et quand le gros coup qu’ils attendaient depuis des mois se présente enfin , l’occasion est trop belle de solder définitivement les comptes avec cette vie de truand déjà morte pour lui, et de mettre Kangou et sa famille hors de portée de son propre destin.

Mais Kangou est décidé à retrouver celui qui les a balancé, d’autant qu’il s’agit d’un proche du Chat, leur complice de toujours. C’est une question d’honneur. Mais pour l’atteindre il va leur falloir en découdre avec un gang, quitte a devenir des loups.

Disons le toutbillets-euros de suite pour que ce soit clair.  » Loupo » est tout simplement le meilleur roman que j’ai lu jusqu’ici chez les éditions JIGAL ! Et pourtant la palette de cette maison d’édition est riche en couleurs et en plumes talentueuses !

Il signe ici un roman remarquable de maîtrise et d’intelligence. En plongeant son lecteur dans les limbes de la délinquance des cités , il évite admirablement les travers et les clichés qui collent habituellement à ce genre de sujet. Par d’apitoiement sur le sort de ses personnages, pas d’excuses sociétales pour justifier leurs actes. Ses personnages ont pris un chemin qu’ils assument et qu’ils revendiquent sans regrets, prêts à en accepter le jeu, prêt à en payer le prix.

L’auteur dissèque à merveille la torture intérieure de son personnage principal, rongé par le remord et le dégoût de son acte imbécile. Dans ces instants, même l’amour de Nora devient une brûlure quand sa main JO Boscopasse sur la peau de son voyou. La douceur de ses gestes, la pureté de son amour met l’homme à nu devant ses actes, et en abîme l’absurdité de son existence à la lumière de son humanité qu’elle ravive parfois.

Car la touche féminine de ce roman en donne toute l’amplitude, toute la profondeur. Que ce soit brièvement cette mère qui pleurs son enfant , ou Nora cette jeune femme que Loupo a rencontré au détours d’un braquage à laquelle il ne veut pas s’attacher mais qu’il a déjà dans la peau.

Sombre et pessimiste, « Loupo » est aussi un magnifique roman sur l’amitié. Jacques Olivier Bosco a réussi  sans doute l’un de ses meilleurs romans qui, s’il venait à remporter cette année quelques prix ne serait que juste récompense pour un écrivain aussi talentueux.

( les habitués des éditions Jigal auront sans doute noté le clin d’oeil de J.O. BOsco à un autre auteur de la maison, Otsiemi, puisqu’un de ses personnages porte son nom)je-commande

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 ©Hippo

6 Commentaires

  1. Gruz

    ça c’est de la chronique passionnée, notre pauvre mulot se retrouve même écrasé sous son coup de cœur 😉
    Dans ma PAL, immense PAL…

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    • La petite souris

      Roman incontournable en ce début d’année ( même s’il est sorti en septembre), une très belle plume ! ne pas l’avoir dans sa PAL serait même une faute de goût ! 🙂 A bientôt !

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  2. jacquesolivierbosco

    Ouf, ça fait chaud au coeur et piquer les yeux. Tu as carrément mis du lyrisme dans tes mots, tes phrases, écrit à la Loupo quoi ! Mille merci pour cette très, très belle chronique. J’allais dire; ce roman « est incompris ». En fait, il touche ou il ne touche pas, je crois que c’est générationnel, ou une question de sensibilité. J’ai beaucoup travaillé, malgré l’impression du « français parlé », pour « toucher » justement le lecteur, plus que sur l’histoire en elle même. Tu es la preuve que cela a fonctionné. Toi, tu n’es pas passé entre les balles ; )
    Milles bises (tu les mérites, (Bruno, je crois).
    JOB

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    • La petite souris

      merci Jacques Olivier, qu’elle belle surprise te voir sur Passion Polar ! non je ne suis pas passé entre les balles et je t’avoue même que je reprendrai bien une petite rafale dans le buffet ! 🙂 En ce qui me concerne je pense que c’est une question de sensibilité. J’ai un faible pour les héros désespérés mais qui gardent au fond d’eux un reste d’humanité. Des écorchés à la vie à fleur de peau ! Et la fin du bouquin j’ai énormément aimé !! j’espère simplement que tu es un multi-récidiviste et que tu commettras très bientôt un nouveau livre ! A très bientôt j’espère !! 🙂

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  3. Oncle Paul

    Bonjour Bruno
    Alors toi aussi tu t’es laissé entraîner par l’univers de JOB ? En effet un sacré bon roman… Au fait as-tu lu la quatrième de couverture ? Pour une fois tu devrais t’y intéresser !
    Amitiés

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    • La petite souris

      je me suis fais avaler tu veux dire !!!! je n’avais pas lu la quatrième de couverture ( je les regarde rarement) , je viens donc de le faire ! héhé c’est que celle ci est particulièrement intéressante !!!! 🙂

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